La compassion - Karuna

 Le deuxième aspect de l'amour est karuna, l'intention et la capacité de soulager et de transformer la souffrance d’une autre personne. Karuna se traduit généralement par « compassion », mais ce n’est pas tout à fait la même chose.

La compassion, au sens littéral, signifie com (avec) et passion (souffrir). Mais nous n'avons pas besoin de souffrir pour apaiser la souffrance d'autrui. Les médecins, par exemple, peuvent soulager la douleur de leurs patients sans devoir pour cela souffrir de la même maladie. Si nous souffrons trop, nous risquons de ne pas être en état d'aider. En attendant de trouver un meilleur mot, nous pouvons continuer à traduire karuna par compassion.

Pour développer la compassion en nous-mêmes, nous avons besoin de pratiquer la respiration consciente, l'écoute profonde et le regard profond. Dans le Sutra du Lotus, Avalokiteshvara est décrit comme le bodhisattva « qui regarde avec les yeux de la compassion et écoute profondément les sons du monde ».

Éprouver de la compassion, c’est avoir un souci sincère d'autrui. Vous savez que l’autre souffre et vous vous asseyez à ses côtés. Vous le regardez et l'écoutez profondément pour pouvoir toucher sa douleur. Vous êtes en profonde communication, en profonde communion avec lui, et cela suffit déjà à apporter un certain soulagement.

Une parole, un acte ou une pensée empreints de compassion peuvent atténuer la souffrance de l'autre et lui apporter de la joie. Une seule parole peut apporter réconfort et confiance, supprimer le doute, aider quelqu'un à ne pas commettre une erreur, réconcilier des parties en conflit ou ouvrir la porte de la libération. Un seul geste peut suffire à sauver la vie d'une personne ou à l'aider à saisir une occasion rare. Une seule pensée peut avoir le même effet, car les pensées donnent toujours lieu à des paroles ou à des actes. Avec la compassion dans notre cœur, chaque pensée, chaque parole et chaque acte peuvent produite un miracle.

Du temps où j’étais novice, je ne comprenais pas comment le Bouddha pouvait avoir un si beau sourire alors que le monde souffrait tant. Cela ne le perturbait donc pas ? J’ai compris plus tard que le Bouddha avait suffisamment de compréhension, de calme et de force pour ne pas se laisser submerger par la souffrance.

Il peut sourire à la souffrance, car il sait comment en prendre soin et l’aider à se transformer. Nous devons être conscients de la souffrance, mais en gardant notre clarté, notre sérénité et notre force afin de pouvoir contribuer à transformer la situation. L'océan de larmes ne peut nous emporter si karuna est présente. C’est pourquoi le sourire du Bouddha est possible.

Thich Nhat Hanh

 Extrait du chapitre « Les Quatre États Illimités »

in Enseignements sur l’amour

in Le cœur des enseignements du Bouddha