le son du silence (fin)

L’espace est ainsi : c’est en lui que les formes apparaissent et disparaissent mais c’est aussi quelque chose que nous pouvons voir et contempler. Ensuite, que se passe-t-il ? Plus nous développons cette conscience de l’espace, plus nous ressentons une immensité s’ouvrir parce que l’espace n’a ni commencement ni fin. Nous pouvons construire des pièces et regarder l’espace qui les habite mais nous savons aussi que l’immeuble tout entier est dans l’espace. Ainsi l’espace est comme l’infini, il n’a pas de frontières.

Cependant, dans les limites de notre conscience visuelle, il y a des frontières qui nous permettent de voir l’espace d’une pièce parce que l’espace infini serait trop pour nous. Cet espace nous suffit pour pouvoir observer la relation entre les formes et l’espace. Le « son du silence » agit de la même manière avec vos pensées: il vous permet d’en percevoir la nature.

Je me suis exercé à avoir des pensées neutres, comme « je suis un être humain», qui ne réveillent aucune réaction émotionnelle. En m’écoutant penser cela, je m’efforce d’entendre la pensée en tant que pensée et le silence qui l’entoure.

Ainsi j’observe la relation entre la faculté de penser et le silence naturel de l’esprit et, ce faisant, je stabilise mon attention, cette capacité de tout être humain à être témoin, à être à l’écoute, à être en éveil. C’est plus difficile sur le plan émotionnel quand on n’a encore pas mis fin au désir de posséder, de ressentir ou encore de tout abandonner.

C’est alors qu’il faut écouter vos réactions émotionnelles. Commencez par observer ce qui se passe quand le silence est présent. Cela peut être de la négativité:

« Je me demande ce que je fais ici » ou « Je perds mon temps ». Il vous arrivera de douter, au cours de cette pratique, mais écoutez bien ces émotions: ce ne sont que des réactions habituelles de votre mental. En le reconnaissant et en l’acceptant, vous verrez qu’elles s’arrêtent. Les réactions émotionnelles s’évanouiront de plus en plus et vous saurez en toute certitude que vous êtes « cela » qui est conscient.

A ce moment-là vous pouvez asseoir les bases de votre vie sur l’intention de faire du bien et de vous abstenir de faire du mal. Paradoxalement, nous avons besoin de cette estime de nous-mêmes. La méditation, ce n’est pas l’idée que, si nous sommes attentifs nous pouvons faire tout ce que nous voulons. Il y a aussi un élément de respect des conditions: on respecte son corps, son humanité, son intelligence et ses capacités.

Il ne s’agit pas de s’y identifier ou d’y être attaché mais la méditation permet de reconnaître ce qui est à notre disposition: c’est ainsi, les conditions sont comme cela. Il faut même respecter nos incapacités.

Avoir du respect pour soi, c’est-à-dire pour les conditions qui nous accompagnent dans cette vie, signifie les respecter quelles qu’elles soient, développées ou atrophiées. Il ne s’agit pas de les aimer mais de les accepter et d’apprendre à travailler à partir de ces bases, aussi limitantes soient elles.

L’esprit en éveil ne cherche donc pas à avoir le meilleur de la vie. Il ne tient pas à avoir la meilleure santé, les meilleures conditions, le meilleur de tout pour y parvenir, parce que cela ne ferait que renforcer un sentiment d’être « quelqu’un qui ne peut fonctionner qu’en ayant le meilleur de tout ». Quand on commence à comprendre que nos faiblesses, nos défauts et toutes ces particularités que nous avons ne sont pas des empêchements, nous percevons les choses correctement. Nous pouvons les respecter et accepter de les utiliser pour aller au-delà de notre attachement à eux. Si nous pratiquons ainsi nous sommes libres de toute identification, de tout attachement à nos images de nous-mêmes.

C’est la chose merveilleuse que nous pouvons faire en tant qu’êtres humains: utiliser l’ensemble des moyens que nous a accordés la vie — et c’est un processus qui ne s’arrête jamais.

Texte offert par le Refuge